« A peine arrivés,
c'est l'heure des cadeaux.. Marie-Claire, vieille habituée,
se pointe avant tout le monde (alors qu'elle a coutume d'être
bonne dernière et de contempler les marmites vides) avec
un mystérieux paquet qu'elle tire de son cabas. «
C'est pour vous, me dit-elle, depuis te temps que vous nous faites
à manger » . L'objet sorti de son journal est un
accessoire de cheminée dont la destination première
est d'abriter la boîte d'allumettes grand format qu'on utilise
pour allumer le feu des veillées d'hiver. Sa seconde raison
d'être est purement décorative avec un motif ornemental
quelconque. Celui qui orne le cadeau de Marie-Claire n'est pas
quelconque, du moins pour moi, c'est une magnifique fleur de Lys
en bronze. « Je l'ai trouvé dans une poubelle »,
m'explique Marie-Claire. Comment mieux tomber ailleurs que dans
une maison où abondent les objets fleurdelisés,
patères, sets de tables, tasses, assiettes, bols, couverts,
cravates, écharpes, chaussettes, qui meublent mon univers
familier.
L'inventeur du trésor aurait droit
à une boîte de friandises la prochaine fois, que
je n'en serais pas étonné. En attendant, elle (l'inventeur)
encaisse un acompte sous forme de fromage et de barquette de hors-d’œuvre.
Justement, ces barquettes parlons-en. La
première dégustation-test avait été
décevante et une seconde expertise eut donc lieu, dans
la semaine, par un chef hautement « bonnetté ».
Verdict du chef : « un peu plus d'assaisonnement pour la
gaîté, une pointe de vinaigre quelques gouttes de
Tabasco, une rallonge de maïs et un peu de persil pour la
couleur et ça devrait se laisser manger ». Si ça
s'est laissé manger messeigneurs ! En deux temps trois
mouvements c'est le contenu de soixante barquettes qui disparurent
sous les claquements de langues approbateurs.
( Jean, si tu me lis, compliments !) Il en reste plus de cent
en stock et l’on reverra sûrement cette entrée
« dynamique ».
Pour la partie consistante du dîner,
ce fut du pot-au-feu. Enlevé,vite fait bien fait, ça
vous cale un estomac vide en moins de temps qu'il en faut à
un candidat-président pour ratisser 500 voix. Suivent plateau
de fromage et fruits pour déboucher sur le dessert. Comme
l'un des piliers de « Vr » ( Merci, Pierre, et compliments)
avait envoyé des confitures, Nicole a donc amené
des génoises pour confectionner sur le champs des fourrés
à la rhubarbe et aux fraises. Je peux vous dire que le
résultat est excellent. Dès que je vois mon excellent
confrère Bocuse (de Lyon) je lui repasse le tuyau.
Mais la Soupe du Roi est un monde de contraste
et l’on y trouve toujours une petite note de mélancolie
qui nous ramène aux dures réalités de la
rue.
Une dame, nouvelle venue, s'inquiète
des horaires.
« A quelle heure, ça commence
? Ah, 7 heures ! J'pourrai pas venir parce que je n'aurai pas
fini ma manche pour payer mon hôtel ! » . Nous lestons
son sac avec du pain, du fromage, du pâté, du gâteau
et elle disparaît, aspirée par la nuit qui tombe
déjà. Pourvu qu'elle revienne la prochaine fois.
De retour dans la chaleur de ma maison, j'ai droit à un
petit reproche conjugal « Pourquoi n'as-tu pas pensé
à compléter sa « manche » pour qu'elle
ait dans la même soirée, le gîte et le couvert
? »
Comment répondre? Je m'en tire, mal,
en disant que j'étais trop occupé par les préparatifs.
Dire que j'aurais pu être Marie et que je n' ai su qu'être
Marthe. Bon sang de bon soir ! Bonsoir. »
Paul T., le 31 octobre 2006
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